¤~~ Légendes, Croyances et Coutumes ~~¤

La musique est assez peu répandue chez les myriennates. Elle perturberait l’osmose avec la nature, et serait preuve d’orgueil : celui qui joue s’écoute au lieu d’être ouvert au silence chantant de la forêt. Le monde est une vivante partition pour celui qui sait tendre l’oreille, toujours changeante, toujours immuable.

Il existe pourtant un nombre limité d’êtres ailés autorisé à "toucher" la musique, comme l’exprime l’expression myriennate appropriée. Cette activité n’est accessible qu’aux myriennates considérés comme les plus proches de la nature, les plus purs. Ceux qui portent sous la peau le motif le plus dense et le plus étendu. Les vrilles de la graine forment parfois un réseau couvrant quasiment l’ensemble du corps, et montrent la symbiose la plus aboutie entre le porteur et le végétal. Les myriennates ayant cette chance possèdent un pouvoir de décision plus grand lors des conseils, mais cela n’interfère pas avec leur activité ordinaire. Ce pouvoir de décision n'est pas effectif en soit. Il se rapporte plus à une sorte de charisme que les autres myriennates respectent. Il n'y a pas de cadre institutionnel visant à donner le pouvoir à certain. Tout se déroule naturellement, en fonction des ressentis, des impressions et des sentiments.

En revanche, le Melith ou souffleur a une fonction qui se rapproche du sacré pour ce peuple. Il ne peut donc pratiquer aucun autre labeur, que ce soit de chasse, de récolte, de cueillette, de construction… Il est entretenu par la communauté qui le remercie ainsi de son rôle crucial. Il doit également renoncer à participer aux assemblées décisionnelles.

Mêlant sa voix, son souffle, au concert de la sève, il affirme l’appartenance des myriennates à l’équilibre du monde, au cycle des vies et des morts. Il ancre les êtres ailés à la terre en introduisant dans la symphonie de la vie un son d’origine céleste qui est le chant, le Picato qui imite les trilles des oiseaux, et la flute Golith dont le timbre rond et doux figure celui du vent. Cette pratique trouve son origine dans une vieille légende, que je vais vous conter ici…



Le ciel tomba un jour amoureux de la terre. Mais ils étaient séparés sans espoir de s'unir. Le ciel est le haut, la terre est le bas. Malgré l'impossibilité de leur relation, le ciel envoya ses messagers, des êtres ailés, qui vivaient dans les nuages, porter à l'élue de son cœur des billets passionnés.

Après quelques voyages, ces derniers se prirent eux aussi d'affection pour la terre. Elle était si foisonnante, face au vide du Ciel ! Ils résolurent alors d'abandonner le Ciel et de s'installer sur la Terre. Mais peu à peu, l'appel du vent se faisait plus fort, et nombreux furent ceux qui, ne pouvant résister, prirent un dernier envol. Nul ne les revu plus jamais.
Comme les ailes grandissaient, l'Appel devenait plus pressant, si bien qu'il n'y eut bientôt plus qu'une petite dizaine de personnes dans la communauté ayant choisi de rester.
Ils crurent que, comme leur ancien maître, ils devraient renoncer à leur amour.
Mais ce fut de leur maître qu'ils reçurent, indirectement, le salut.

Le Ciel, désespéré, se languissait de son aimée. La Terre, touchée par tant de tristesse, lui fit la promesse de s'unir à lui, un jour. Quand les messagers annoncèrent cette nouvelle au Ciel froid et immense, il versa des pleurs pour la première fois. Lorsque les larmes du Ciel tombèrent sur la Terre, elles firent germer les graines d'espoir qui parsemaient sa peau. Ainsi naquit la Forêt, image de la promesse du Ciel et de la Terre: les arbres poussent vers le Haut, tentant d'atteindre les nues. Mais jamais ils ne parviennent à toucher le Ciel, qui pleure de les voir si proches et si lointain, et leur donne l'eau nécessaire pour grandir encore, jusqu'à ce qu'un jour, peut être, leurs cimes disparaissent dans les nuages...

Mais que devinrent les messagers? Certains affirmaient qu'ils n'avaient pas leur place sur Terre: leurs ailes les désignaient comme habitants du Ciel. Pour contrer l'influence de leurs membres emplumés, ils décidèrent de se lier d'eux même à la Terre, en inscrivant dans leur corps leur appartenance à son unité. Ils implantèrent sous leur peau la graine du palétuvier qui développa ses entrelacs à sa surface. Ainsi, ils s’enracinèrent à la Terre et purent y rester sans crainte de voir l’Appel du vent faisant frémir leurs plumes emporter leur cœur…

Ce jour là, les messagers du Ciel se donnèrent le nom de Myriennates.

Leurs chants sont une prière pour qu’un jour la Terre et le Ciel puissent s’unir, pour que la forêt grandisse et que les arbres poussent. Leur souffle se veut le lien entre ces entités, lien nécessaire pour qu’eux, enfants du Ciel, puissent rester auprès de la Terre tant aimée.

Certains myriennates prétendent à une union parfaite avec la Terre, et souffrent de ne pouvoir l’atteindre, parce qu’issus du ciel ils restent de nature différente. Leurs ailes servent à voler, et sont presque inutiles dans la forêt dense. Pourtant ils ont choisi leur mode de vie et leur allégeance. La rigidité des coutumes myriennates, cause de leur renfermement sur eux même, vient de ce fait : les anciens n’oublient pas que chaque myriennate porte en son dos des ailes, et que tôt ou tard, lorsque celles-ci pousseront, l’Appel du Ciel, de la liberté, retentira…

Ainsi sont les myriennates, déchirés entre leur amour fusionnel pour la Terre et leur origine céleste…

Les Lunarticiah restent un peuple mystérieux qui ne nous a laissé que trop peu d'informations à leur sujet. Aujourd'hui à la limite de l'extinction, la plupart d'entre eux sont peu loquaces et les informations que nous avons pu recolter sont bien trop minces. Ici, nous discuterons un peu des particularités biologiques qui font des lunarticiah des êtres hors du commun...

Commençons par un caractére relativement simple : leur adaptation au froid. La température interne des lunarticiah s'échelonne entre 10 et 20 degrés, ce qui est de loin la plus froide qu'on ait jamais observé. Cette température reste à peu près constante quelque soit l'activité pratiquée. Les Lunarticiah sont donc homéothermes. Il semblerait que plus un lunarticiah est âgée, plus sa chaleur corporelle est basse. Ce simple constat resultant de plusieurs milliers d'années d'adaptation au climat polaire d'Irandice est bien plus lourd de conséquences que l'on pourrait l'imaginer au premier abord...

Tout d'abord, les battements cardiaques au repos n'excédent pas trente battements par minute. Durant une activité soutenue, le coeur peut néanmoins battre à un rythme près de quatre fois plus rapide, presque autant que chez un ansurien standard, donnant à leur propriétaire un rendement énergétique considérable durant l'effort, qu'il soit physique ou magique. Le systême cardiaque est batti sur le même modèle que la plupart des autres peuples, si ce n'est qu'il est en partie cristallisé, pour des raisons que nous verrons ci après...

Les rythmes physiologiques sont les mêmes que chez les autres peuples mais on peut noter quelques différences, toujours dues à l'adaptation au froid : la chaleur corporelle basse des lunarticiah rend les reactions enzymatiques et protéïques plus lentes et influe sur leur rythme de vie. La croissance est plus lente : à vingt ans, un lunarticiah est adulte mais en apparence, il fait plus adolescent qu'adulte. Leur longévité s'en trouve également particuliérement accrue : le peu d' ouvrages que nous avons parle de lunarticiah âgés d'au moins 600 ans ; on dit aussi qu'ils pourraient atteindre le millénaire ! Personne ne sait ce qu'il advient d'un lunarticiah quand il meurt de viellesse ; certains disent qu'ils disparaissent finalement, se transformant entiérement en glace, mais cela ne reste que pures légendes et ce fait n'a jamais pu être vérifié. Ils ne semblent pas affectés par la sénescence même à un âge très avancé, ceci pour des raisons mettant en jeu leur forte affinité aux antiques forces magiques qui régissaient le monde avant l'apparition de l'essence divine. De même, les cycles menstruels chez les femmes sont plus longs que chez la plupart des autres peuples et on en compte environ entre une et trois par siécle ! les régles durent une semaine, pareillement pour l'ovulation. La grossesse est également assez longue et dure seize mois, soit presque deux fois plus longtemps que chez un Ansurien moyen.

Leur peau et leurs cheveux généralement très pâles voire bleutées contient un pigment unique, l'azurine, possédant entre autres la faculté d'avoir des propriétés fluorescentes (renforcés par la réfraction de la lumière dans les cristaux enchassés dans leur peau) qui font que la peau des lunarticiah luit légérement, ainsi que d'être un bon isolant thermique, ajoutant une protection supplémentaire contre le froid... mais pas contre la chaleur !

Les hautes températures sont en effet un fléau pour le peuple des glaces. Un lunarticiah exposé à une haute chaleur ainsi qu'à une forte insolation voit son rythme physiologique s'emballer. Sa peau fragile a tôt fait de brûler au soleil. La fiévre le prend en général assez tôt et il devient rapidement malade (tout comme un ansurien peut avoir un rhume suite à un coup de froid). Si l'exposition se prolonge, les symptômes s'aggravent et peuvent très bien conduire à la Mort.

Parlons à présent du systême nerveux de ce peuple mystérieux. Celui-ci est tout à fait remarquable et ce à plus d'un titre :

- Des recherches anatomiques poussées ont dévoilé la présence d'une glande liée au systême nerveux, au niveau de la cinquiéme vertèbre toracique. Nous l'avons nommé « glande lunaire », à cause de sa forme de croissant. Cette glande semble appartenir au systême endocrinien et permet la régulation d'enzymes spécifiques aux lunarticiah : la lunartite. Celle-ci semble primordiale pour le rendement physiologique des lunarticiah. La glande lunaire stoque l'énergie en excédent de l'organisme et le restitue en lunartite lorsque le besoin s'en fait sentir, ce qui explique notamment pourquoi on a jamais vu de lunarticiah pourvu de surcharges pondérales...

Ce rendement fait que les lunarticiah ont peu de besoin alimentaires. Pourtant beaucoup d'entre eux mangent autant que les autres peuples, ce qui importe relativement peu finalement, vu qu'ils ne stoquent pas sous forme de graisses mais le transforment en lunartite.

- Le systême nerveux en lui même est de composition semblable à celui de tout être vivant, mais il est bien plus dense. Les structures moléculaires qui le composent se repétent à l'infini, formant des réseaux réguliers. Lors de la croissance, le systême nerveux forme par endroit des protubérances dans lesquels s'accumule ces réseaux, qui s'adaptent alors à la pression interne du corps et forment des cristaux organiques qui émergent de la peau, et donc deviennent visible. Ce phénoméne n'est aucunement douloureux, à peine cause-t-il quelques démangeaisons... au début en totu cas. Car avec l'âge, les cristaux se font plus nombreux et le sujet peut par la suite souffrir d'arthrite.

- Le cerveau, tout comme le reste du systême nerveux, est très densifié, attestant de manière certaine que les lunarticiah sont pourvus de capacités cognitives supérieures à la moyenne, ce en quoi les principaux interessés acquiescent. On peut noter cependant la présent d'une région supplémentaire dans le cervelet, dont la fonction est restée mystérieuse jusqu'à ce que des études très récentes mettent la lumière sur cette enigme. Cette zone semble contrôler un « sixiéme sens », permettant aux lunarticiah de sentir et manipuler l'énergie magique de façon innée et intuitive. Rappelons que ce peuple des glaces se sert de la forme ancienne de l'énergie magique, celle native de l'ére précédant celle des esprits créateurs. Les lunarticiah ressentent moins le besoin de repos et la plupart se contentent de dormir trois heures par jour, ou alors passe une longue nuit de dix heures tous les trois à quatre jours. D'autres encore n'ont aucun besoin de sommeil et sont donc insomniaques... mais ce n'est pas sans conséquences et cela se traduit comme chez les autres peuples à un épuisement graduel du corps ! Certains autres ont adopté les cycles de sommeil des autres peuples et ne s'en portent pas plus mal au final ; on pourrait même dire que ce surplus de repos leur permet de développer une impressionnante vitalité.

Nous finirons ce chapitre en disant que les lunarticiah sont remarquablement bien adaptés à l'environnement polaire ainsi qu'à la magie. Nul doute qu'ils sont et resteront les meilleurs mages de notre monde durant de nombreux siècles encore... nous ne pouvons que déplorer le funeste destin qui a frappé ce peuple et espérer que ceux-ci survivent encore des lustres...



Extrait des notes de recherche de Inyliss Dalaeress, naturaliste Clamyde spécialisée en anatomie interpeuples.

Les liens reliant le peuple hellbereth à la magie sont parmi les plus ténus d’Initium. En effet, peu nombreux sont les membres de cette race s’adonnant à l’art de manipuler l’essence divine. Outre les quelques exceptions qui rejoignent Thélus pour s'y faire enseigner cette noble doctrine, seuls les chamans apprennent la magie parmi ce peuple. Nous allons voir ici ce que sont les chamans, ces êtres particuliers que l’on rencontre dans certaines tribus hellbereth.

Les Chamans (ou Shamans, les deux orthographes existent puisque ce terme vient d’un ancien dialecte des montagnes qui ne possédait pas de forme écrite) sont des membres à part dans ces tribus guerrières. Si un hellbereth de plus de 10 ans à l’air d’un gringalet (certaines mauvaises langues diraient l’air normal) alors vous pouvez être certain qu’il s’agit d’un chaman. « Ceux qui tutoient la mère » comme certains montagnards les appellent, recrutent en effet très jeune leur successeur, on raconte qu’ils peuvent sentir le potentiel d’un être à manier l’essence divine, et ils le prennent auprès d’eux comme apprenti jusqu’à leur mort. L’étonnante longévité de ces hommes est de notoriété publique, les chamans arrivent donc relativement tard à leur statut final, mais en ayant eu le temps d’apprendre toutes les connaissances emmagasinées au cours des âges.



Ces puits de sagesse parmi les barbares sont extrêmement importants dans une tribu, l’autorité oscille souvent entre le chef et le chaman. On a couramment vu des villages se déchirer quand un chef et le chaman étaient en désaccord. Certains de ces hommes étranges préfèrent conseiller le chef, alors que d’autres tiennent place de deuxième visage de l’autorité.
Les premiers sont souvent des manipulateurs, affichant un air de sagesse pour jouer avec un chef qui prendrait des décisions qui ne leur conviendrait pas, mais cela implique un certain manque de volonté du chef. On trouve les second plus souvent dans les tribus possédant un conseil de village.
Plus rarement, ces hommes de magie tiennent eux-mêmes le rôle de chef.



Selon certaines croyances hellbereth, le monde est une entité vivante ; une entité féminine qui nous aurait tous engendrés et qu’ils nomment « la mère », s’y ajoutent de nombreuses entités différentes telles que le feu, le vent, les plantes, les animaux… Chacune pouvant leur apporter différentes informations qui leurs son propres (par exemple en écoutant le vent on pourrait connaître le temps à venir). Dans cette vision des choses, les chamans sont le lien entre les hommes et « la mère ». Ils sont donc les leaders spirituels de leur tribu, les guidant sur la route d’honneur qui doit leur permettre d’accéder à l’amour de la mère et au repos en son sein après leur mort. Les croyances chamanistes soutiennent qu’ils sont en dialogue direct avec le monde. Il s’est avéré qu’ils se servaient de magie pour communiquer entre eux malgré la distance, on n’a néanmoins aucune preuve de quelconques discussion avec « la mère ».



Le lien de ces hommes avec l’essence divine est réellement particulier. Ils utilisent des sorts très puissants et inconnus des autres congrégations magiques. (On a d’ailleurs remarqué que les hellbereths rejoignant Thélus pour y être éduqués deviennent souvent des mages parmi les plus grands, ce peuple possède donc peut-être un don erratique, certains membres montrant des prédispositions certaines alors que d’autres sont presque dépourvus d’une aptitude à manier l’essence divine) Revenons à notre sujet. Ces hommes croient que leurs pouvoirs leur viennent de la nature et toute leur utilisation est fortement imprégnée de cette idée. Par exemple, ils se servent de leurs dons pour améliorer grandement les effets de leur médecine basée sur les simples, désinfectant et refermant en quelques heures (voir moins), avec un cataplasme ou un bandage imprégné, une plaie qu’il aurait fallu plusieurs jours voir semaines à guérir avec le même remède sans utilisation de magie.

On trouve aussi dans leurs coutumes d’étranges rituels. Notamment celui du passage à l’âge adulte. Qui consiste à rendre l’enfant « complet » pour en faire un homme. Cette totalité de l’être s’obtient en trouvant son animal frère. Le Monde est censé leur dire quand un enfant est prêt pour ce rituel, le chaman va alors le chercher dans sa famille. Il lui inscrit des runes sur le ventre avec une mixture à base de plantes écrasées et de sang animal. Ces inscriptions doivent servir à attirer l’animal frère. Ensuite on fait boire à l’enfant une potion pour attiser son âme, en réalité il s’agit certainement d’un genre de drogue à base de plantes infusées. L’enfant part dans la nuit pour sa première chasse. Il tue l’animal qui se présente et inscrit sur son propre ventre, avec le sang de l’animal frère, une rune signifiant « complet ». Le garçon revient au village le lendemain. Là le chaman connaît toujours l’animal rencontré (nous n’avons toujours pas réussi à comprendre comment il s’y prend) et en tire des conclusions sur le caractère à venir de l’enfant, qui est maintenant un homme.


On peut finalement conclure que les chamans hellbereths forment un clan très fermé parmi les mages d’Initium. Leur approche de la magie caresse l'état de religion. Ils gardent jalousement leurs secrets, mais leur rôle primordial au sein de leurs tribus en fait les clés de voûte de toute l’organisation du peuple hellbereth, influençant la vie de tous, même des villages qui ne partagent pas leurs croyances animistes.